En ce moment, on ne finit pas d’être impressionné par le
cinéma argentin. En s’intéressant un peu au cinéma de ce pays, je me suis rendu
compte de la richesse du cinéma local. Ce cinéma m’a touché grâce à ses acteurs
et réalisateurs aux personnalités si fortes et singulières. J’ai vraiment
découvert un nouvel univers dont j’ai envie de parler avec vous. Aujourd’hui,
sort en salle le film argentin « Ultimo Elvis » d’Armando Bo avec
John McInerny et Griselda Siciliani. Pour l’occasion, je vais donc vous parler
de ce film qui m’a réellement interpellé.
Ultimo Elvis, c’est l’histoire d’un homme : Carlos
Gutierrez. Mais qui est-ce ? D’où sort-il ? Cet homme quadragénaire a une
double vie. La journée, c’est un simple ouvrier dans une usine. Lors de ces
longues journées de dur labeur, il subit humiliations sur humiliations, pas
évident tous les jours, mais il a l’air d’accepter la situation. Surtout
au-delà de ça, il a l’air réellement largué, il boit beaucoup et doit gérer sa
fille qu’il garde momentanément car son ex-femme vient d’avoir un accident de
voiture. La nuit, gros changement de décor, Carlos profite de sa ressemblance
vocale (et un peu physique) avec Elvis Presley pour se transformer en King !
Malheureusement, ce n’est pas aussi glamour et paillettes que ça, il se
retrouve à jouer dans des cabarets glauques à l’ambiance assez louche.
Jusqu’ici pas vraiment de problèmes vous allez me dire, certes il a une vie
difficile, il arrondit ses fins de mois avec sa « carrière de sosie » mais ce
n’est pas si pire. Mais bien sûr, l’histoire n’est pas si simple, Carlos va
devenir schizophrène. Il va se mettre à confondre sa vie et celle du King. Il
va jusqu’à appeler sa fille Lisa Marie et penser que c’est lui qui a créé le
rock’n’roll. Il va en oublier sa propre existence ce qui l’emmènera sur un très
mauvais chemin loin de son entourage et de sa réalité… Mais jusqu’où va-t-il
aller dans sa folie ? Va-t-il survivre à cette crise identitaire ?
Dans ce film, Armando Bo nous livre un récit noir et
mélancolique d’un homme ordinaire qui a perdu sa propre conscience. Armando Bo
a toujours été intéressé par ce thème de l’identité des personnes. Il aime
travailler sur le déni et le dédoublement de personnalité. Même si ce film est
le premier qu’il écrit seul, il ne faut pas oublier qu’il a co-écrit le film «
Biutiful » de Alejandro Gonzales Inarritu avec Javier Bardem. Cette expérience
se ressent dans son travail aujourd’hui. Cet homme est un vrai passionné qui
s’inspire de grands cinéastes (Truffaut, Kubrick, Paul-Thomas Anderson ou
encore les frères Dardenne) mais surtout de ce qu’il perçoit de la réalité dans
la vie de tous les jours. Ce film est un vrai bijou car il nous présente deux
problématiques dans une seule histoire. D’un côté, on observe la problématique
de cet homme et de son identité. De l’autre côté, Armando Bo souligne le
problème de repères qu’il y a en Argentine. Les Argentins sont en manque de
repères et de modèles, ils n’ont pas de référence autour d’eux. Toute cette
histoire est accompagnée par une très belle interprétation de John McInerny dans le rôle du King.
Dans le film, John McInerny n’est pas doublé, s’est vraiment lui qui chante les
classiques d’Elvis avec un mimétisme assez troublant pour nous, spectateurs.
D’ailleurs, nous pouvons noter que physiquement, il ne lui ressemble pas plus
que ça. C’est ça qui est merveilleux, il arrive à nous convaincre sans être un
vrai sosie ce qui est encore plus touchant. Par ailleurs, soulignons que les
chansons choisies (Unchained Melody, Always on My Mindou ou encore I’m so
lonesome I could cry) dans le film vont à merveille avec les sentiments du
personnage. Avec ce film, nous assistons en direct à « une métaphore sur le
manque de personnalité, le déni et l’idolâtrie » comme le dit le cinéaste
Armando Bo. Ce film nous fait réfléchir sur le destin tragique de tous ces
sosies professionnels qui oublient de vivre leur propre vie en voulant vivre
celle de leur idole.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire